Review of The Endless Change Of Colour [12k1074]

SWQW (FR)

Faire vœu de dépouillement. Collecter les infinies nuances du familier. Ne conserver que cela. Clarifier, enfin avoir suffisamment de toile pour peindre des déclinaisons inconnues dans les doublures du temps.

L’allemand Marsen Jules nous avait laissé avec son très bel album Nostalgia, en 2011, paru sur son propre label Oktaf. Celui qui avait fait son entrée sur City Centre Offices avec Herbtslaub en 2005 franchit aujourd’hui un nouveau seuil en pénétrant le label de Taylor Deupree. Marsen Jules laisse en effet derrière lui le format d’album classique pour lui préférer une unique piste de presque cinquante minutes, nourrie d’un vieil enregistrement de jazz.

De cette piste, il ne reste plus de traces reconnaissables. Les drones cristallins forment un corps de pureté livré aux marées du temps. On pense alors parfois aux travaux de Stephan Mathieu sur ce même label 12k, pour ces volutes sonores filtrées dans le silence et le revers des époques.

Marsen Jules dessine par retouches successives. Il boucle, réitère, et épure. Estompe ou renforce les doses d’intensité. Hisse une fréquence pour en faire entendre sa pulsation diaphane, et remanie l’infime de ses flux sonores qui évoluent dans la douceur du recueillement.

Les différentes nappes fréquentielles frôlent tour à tour la disparition dans un cycle constant où se niche une tranquillité retrouvée. Elles cherchent l’équilibre dans leurs reflets, tournent sur elles-mêmes et intercalent des filets de transparence entre elles et la lumière qui les enveloppe.

<i>The Endless Change Of Colour</i> est une longue piste adossée à l’essentiel, en quête de lenteur et de regards ouverts sur l’invisible. Dans son apparente absence de rythme ou d’avancée, elle recueille des variations uniques qui se déclinent selon les angles des minutes, selon l’attention portée par celui qui écoute, ou les degrés des déchirures offertes. Elle conduit ainsi les yeux à ce point de bifurcation où le quotidien rejoint un mystère sans fin, et où les changements de couleurs deviennent eux aussi infinis.

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