OndeFixe (FR)

Fallait-il voir dans la relecture de l’album Every Still Day des japonais Eisi un signe annonciateur d’un certain virement de bord de la part de Taylor Deupree. Et bien oui et non. Car même si ce véritable dentelier du minimalisme électronique, par ailleurs designer et gérant des structures 12k et Happy, s’était alors attaqué à un format plus ouvertement “pop” pour un résultat tout bonnement magnifique, il revient avec Northern vers des climats auxquels il nous avait habitués avec ses précédents efforts solo (Stil., January).

Néanmoins, de manière palpable, on sent une dérive vers des formes musicales moins systématiques et mécaniques que par le passé, plus accueillantes et organiques aussi.

Ainsi sont régulièrement incorporées des sources acoustiques (traitées à des degrés divers, déstructurées puis ré-agencées minutieusement) telles que guitares, piano électrique et mélodica (sur Northern et “November”, à l’esthétique sonore proche du récent Sewn des Mountains), voire quelques volutes de flûte de pan apportant une touche de mysticisme, sur “A Dead Yellow Carpet”, chahuté par de légers chuintements chaotiques.
De nature éphémère, fragile et tranquille, sa musique mêle ces sources acoustiques à un bain sonore où flottent ondes sinusoïdales, fines émissions digitales mélodiques et rythmiques, animées par des micro-mouvements perpétuels et incessants.

Evoquant la lente chute des flocons de neige, les forêts muettes et étendues monochromes hivernales, la réverbération des rayons solaires sur une fine pellicule de glace, Northern semble laisser davantage d’espace à la spontanéité et à la libre expression de l’âme d’un jeune père ayant quitté le bitume grisâtre de Brooklyn pour une campagne verdoyante. Un déracinement et une paternité aux reflets ici perceptibles. (8.0)