Liability (FR)
Hormis un live sorti l’année dernière ( Live 1 : Mapping), Taylor Deupree, heureux fondateur de la structure 12k, n’avait plus rien publié seul depuis Northern en 2006. On sait que Deupree, outre son propre label, est engagé dans plusieurs projets à la fois, collaborant avec bon nombre de créateurs sonores du monde entier. Il est difficile dans ce cas là de se concentrer sur des travaux plus personnels. Néanmoins, il y parvient et ce à un rythme de croisière tout à fait raisonnable au vu de son activité globale. Shoals est donc sa dernière livraison et, comme d’habitude, il met en exergue une musique tonale, esthétique, éthirée et brumeuse qui comme le suggère la pochette du disque se matérialise aux aurores dans un milieu organique. L’idée de ce disque est venue de la découverte de gamelans javanais et balinais à l’université d’York où il fut gracieusement invité pour une résidence. A partir de ces instruments, Taylor Deupree s’est mis à construire quatre morceaux à l’architecture diluée et portant en eux une certaine approche de l’éternité. Rien de proprement ébouriffant mais Taylor Deupree est tellement dans le ressenti et une sensibilité fragile qu’on se sent facilement accompagné par cette musique intemporelle. De cette terra incognita fantasmée, Taylor Deupree nous en fait une description détaillée, chirurgicale mais pas forcément clinique. Les quatres morceaux de Shoals survole lentement les eaux matinales que l’américain a choisi de scruter délicatement.
La chose peut paraitre un peu suranée ou défiant le mur du songe mais on ne peut s’empêcher de trouver tout cela apaisant, une beauté froide qui soulage les neurones et les dilates sans que l’on ait le moindre effort à fournir. Tout nous semble alors des plus aisé avec Taylor Deupree et même s’il évolue entre l’abstraction électronique et l’ambient la plus sobre on ne peut que faire corps avec cette musique contemplative qui n’accepte aucune ligne mélodique. Les choses semblent simples et aller de soi. Aucun élément perturbateur ne vient s’insinuer dans ces ambiances organiques et minutieuses. On n’en attendait pas moins de Taylor Deupree qui au fil de ses disques se bonifie pour atteindre une sorte de perfection qui ne s’embarrasse jamais d’un mysticisme de bazar. Ici, les gamelans font corps avec les traitements électroniques de Deupree et ne semblent pas pouvoir se dissocier. C’est cette symbiose qui donne tout l’intérêt et la beauté de Shoals. Ce disque est donc un régal de béatitude mais aussi un parfait stimulant cérébral.
par Fabien